1/ Muriel Boulmier, vous êtes une personnalité aux multiples facettes, à la fois chef d’entreprise, militante associative engagée dans la vie de votre région, mais aussi et surtout experte des questions liées au vieillissement. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

Je suis Directrice Générale du Groupe Ciliopée, PME agenaise de 120 salariés. Parallèlement, j’ai développé mon expertise en matière de vieillissement actif au travers du groupe de travail « Évolutions démographiques et vieillissement » du Comité européen de coordination de l’habitat social (CECODHAS) que je préside, mais aussi en tant que personnalité qualifiée à la Commission nationale des comptes du Logement, au Comité régional de l’habitat d’Aquitaine, et au Conseil économique et social régional d’Aquitaine. Auteure de deux rapports de missions ministérielles sur le lien Habitat et Vieillissement en France et en Europe, j’ai été sollicitée en 2011 par le gouvernement comme expert Logement pour le « Débat national sur la dépendance». Je suis convaincue que nous devons changer notre perception du vieillissement : bien vieillir est une réalité tout autant qu’une chance.

 

2/ Pourquoi avoir pris fait et cause pour le vieillissement actif en France et en Europe ?

Le nombre de personnes âgées de plus de 75 ans aura triplé d’ici à 2050. Ce vieillissement démographique peut être un atout économique et social important pour notre pays, et pour l’Europe, à condition que les autorités se saisissent réellement de cette question. Dans ce contexte, l’habitat prend toute sa dimension : les politiques publiques doivent encourager l’accompagnement massif du vieillissement chez soi.

Les Français expriment très majoritairement leur attachement à leur domicile, un lieu familier et rassurant. 90% d’entre eux préféreraient y demeurer si leur état de santé venait à se dégrader, plutôt que d’aller en maison de retraite. Si les seniors sont propriétaires à 74%, nombreux sont ceux, encore autonomes, qui n’ont pas les moyens d’adapter leur logement aux nécessités de l’âge, qui vivent dans un inconfort facteur de risques et de dépendance accidentelle. Un autre chiffre mérite d’être posé en parallèle : 89% des Français disent ne pas pouvoir financer un hébergement en maison de retraite.


3/ Concrètement, que proposez-vous pour favoriser le vieillissement à domicile ?

Nous devons faire évoluer notre système grâce à des réglementations ouvertes, favorables à l’adaptation du logement. L’adaptation de l’habitat représente un élément central de prévention de la dépendance : garantir un maintien à domicile durable, désiré, confortable et sécurisé constitue une réponse appropriée, d’un point de vue économique autant qu’affectif. Pour la mettre en oeuvre, il me paraît essentiel de décloisonner les modes de financement par un réaménagement des aides publiques et du dispositif fiscal dans ce domaine : par,notamment, la généralisation des micro-crédits pour les personnes âgées souhaitant adapter leur résidence principale, le transfert de crédit d’impôt des personnes âgées vers leurs descendants qui financent les travaux d’adaptation nécessaires au maintien à domicile de leurs aînés sans faire appel à l’aide publique.


4/ Femme de réflexion et d’action, vous êtes très investie sur le terrain économique et dans l’investissement social. Qu’est-ce-qui motive un tel engagement ?

Je pense que c’est tout d’abord la gestion de mon entreprise qui me permet de mettre en œuvre les idées et réflexions que je développe au quotidien, notamment en matière de défense des droits des femmes et de parité hommes/femmes. En effet, j’ai toujours été sensible à la place qu’il revient aujourd’hui de rendre aux femmes dans leur environnement de travail, de loisirs et dans leur épanouissement personnel.

A cet égard, j’ai créé en 2008 l’association « Fées du Sport », le sport au féminin, qui promeut la pratique du vélo comme sport et comme moyen de transport pour les plus démunis. J’ai également initié en janvier 2013 l’association « Energies de femmes », espace d’échanges et de réflexion sur le quotidien des femmes de ma région.


5/ Vous vous investissez également pour l’Europe…

Oui, car je suis nourrie de la conviction européenne convaincue, et je regrette cette vision de l’Europe réduite à une technocratie : lointaine, déshumanisée, distante, froide, et condamnée à l’envi comme étant la source de tous nos maux, un langage qui appartient aussi, et malheureusement, à certains responsables politiques.

Bien au contraire, je pense que l’Europe représente une formidable opportunité, et une source de progrès pour chacun et chacune d’entre nous. A l’occasion de la Présidence française de l’Union européenne, en 2008, je me suis engagée pour le lien entre le quotidien de nos compatriotes et la réalité européenne. La désignation de 2012 comme « Année européenne du vieillissement actif et de la solidarité intergénérationnelle a mis en lumière cette Europe vieillissante mais source d’innovation, d’emploi et de croissance.

D’ailleurs, l’avenir de la France ne pourra se dessiner seul, et l’Europe, c’est 500 millions d’habitants, une force qui évite l’isolement, mais aussi un espoir de compétitivité, de valeurs, d’avenir de nos territoires, et de responsabilité citoyenne.


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